9°dimanche après la Pentecôte

             Jr. 22. 5,9               1 Co. 10. 6,13                    Lc. 19. 41,47a

Au Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, bien aimés, l’Église nous met en face de la ruine de Jérusalem qui allait survenir quelques décennies après la résurrection de Jésus-Christ. Cette prophétie est à contempler car elle nous concerne. Comme l'a annoncé Jésus-Christ à la samaritaine, nous adorons en esprit et en vérité et non plus à Jérusalem, ni à Rome ni à Constantinople ni à Moscou ni à New-York...La Jérusalem céleste est en devenir, elle est le Royaume de Dieu. Il n'est ni ici ni là; il est dans le cœur de ceux qui ont été appelés et qui ont répondu oui à cet appel. Cette Jérusalem intérieure en devenir est en danger d'être détruite comme la Jérusalem terrestre au 1° siècle. « Restez debout » dit l'apôtre Paul afin d'éviter la chute toujours possible. Qui sont dès lors « les marchands du temple ». Ils sont les « ennemis » intérieurs du temple de la Sainte Trinité qu'est l'esprit de l'homme révélé à lui-même. Il est en danger d'être assailli, envahi, détruit comme vient de nous l'enseigner l'apôtre Paul. Le premier ennemi est l'idolâtrie du « veau d'or » : les richesses prennent toute la place et à leur suite, les divertissements. Les soucis du sens de la vie et de la vérité s'amenuisent jusqu'à disparaître. Il s'agirait de se laisser fasciner par la diversité des passe-temps. La seconde idolâtrie est celle des plaisirs quand ils veulent suffire, quand ils prennent toute la place. L'homme se réduit à l'état d'objet de plaisir, jusqu'à la déception, la décrépitude et la mort. - les plaisirs sont légitimes quand ils restent à leur juste place qui est seconde. L'idolâtrie de l'humain est le troisième danger, plus insidieux, plus nocif. L'ennemi est la volonté d'en rester à la condition mortelle . Il est mépris de ce qu'a été la manne pour le peuple élu et qui est la communion au Corps et au Sang du Christ, seule nourriture et seul breuvage de la vie éternelle. Par ce mépris, l'homme devient une prison pour lui-même. Le quatrième marchand et geôlier du temple intérieur est la volonté d'avoir raison contre Dieu. On se met à lui reprocher les épreuves,les maladies, la mort, les guerres qui sont l'héritage de la volonté humaine pervertie. C'est elle qui va jusqu'à reprocher à Dieu le destin personnel ou celui de l'humanité quand elle fait mine d'ignorer l'autonomie qui lui a été donnée. C'est dans l'efficacité moderne qu'il prétendait trouver dans l'athéisme et selon la loi du plus fort, que le génocide du peuple élu a été entrepris au milieu du 20° siècle par des hommes . Et les deux guerres mondiales ont été œuvre humaine. Quand l'homme devient lucide en face de ces quatre dangers, il commence à pouvoir entendre Jésus-Christ. Mais il y a encore un autre ennemi qui peut expulser la Jérusalem intérieure. C'est l'équivalent de la révolte contre Moïse et Aaron, choisis par Dieu pour guider l'homme vers la Loi qui va révéler l'hypocrisie , c'est-à-dire l'insuffisance humaine. « Pourquoi Moïse, pourquoi Aaron , et pourquoi pas moi ! » dit l'individualisme moderne, cette nouvelle idole. La rancœur, l'envie, la jalousie en sont les fruits. Le royaume de Dieu qu'on prétend servir est en fait expulsé. Pour demeurer dans la vraie liberté, cette grâce, il est nécessaire de ne pas interrompre le combat intérieur contre ses propres « marchands du temple ». Ils sont ces « ennemis » que les psaumes demandent à Dieu d'anéantir. Ce sont des volontés perverses dont l'homme cesse d'être victime et complice dès qu'il les reconnaît et demande à Dieu la grâce de l'en libérer. C'est alors que le royaume de Dieu devient viable et peut donner ses fruits : l'amour de Dieu, l'amour de l'autre et de soi-même quand le nom personnel et unique commence à se faire entendre, grâce intime dans le silence de la vie intérieure.

Que Dieu nous donne ce bouquet de grâces.

                                                Père Bernard